2023, Vie locale

Publié le jeudi 17 août 2023

Ce mardi 15 août a eu lieu la célébration du 79e anniversaire de la Libération de Dinard par les troupes alliées.

Allocution du Maire, dépôts de gerbes et exécution des hymnes nationaux (Grande-Bretagne, Etats-Unis, France) par l’école de musique Maurice Ravel étaient au programme de cette cérémonie qui s’est déroulée devant le monument aux morts, place du Général de Gaulle.

Les enfants ont également ravivé la flamme du souvenir aux côtés du Maire de la ville, Arnaud Salmon.

Ensuite, un vin d’honneur était offert par la municipalité au sein du square Jean Moulin.

 

Allocution de Monsieur Le Maire, Arnaud Salmon pour la commémoration du 79ème anniversaire de la libération de Dinard.

La seconde guerre mondiale a bouleversé l’ordre mondial durablement.

Dinard, comme tant d’autres villes et villages français aura subi les conséquences de la folie guerrière et meurtrière de l’envahisseur nazi.

Occupée depuis le 17 juin 1940, ces 4 années jusqu’au débarquement de juin 1944, ont été marquées par la peur, les privations et l’humiliation.

Durant ces 4 longues années d’occupation, de travail obligatoire, une résistance se met en place. Cette dernière s’organise sous l’impulsion de l’appel du Général de Gaulle du 18 juin 1940 avec les forces françaises libres puis les forces françaises combattantes et, enfin, les forces françaises de l’intérieur. L’objectif est de renseigner sur l’occupant, participer à l’évasion des aviateurs alliés abattus, préparer le débarquement et la reprise du combat sur le territoire national. Nombre de dinardais périront dans ce cercle infernal de répression des autorités nazies.

De nombreux lieux à Dinard portent le nom de ces héros de l’ombre : Paul AUDRIN, Georges PIAN, André CHAPRON, Michel RENAUT, Raphaël VEIL.

Les Alliés mènent un combat difficile en Normandie à la suite du débarquement du 6 juin, face à un ennemi aguerri. La percée d’Avranches et de Pontaubault est déterminante fin juillet 1944.

Le général Patton va alors lancer 3 forces mobiles pour conquérir le plus rapidement possible la Bretagne, vers les ports militaires d’abord, Lorient et Brest, et la troisième qui doit longer la côte nord afin de prendre à revers les forces qui tiennent le mur de l’Atlantique.

Le mur de l’Atlantique à Dinard est partie prenante de la zone de défense de Saint-Malo, dont le front fortifié passe au sud de Pleurtuit entre Rance et Frémur. Une première tentative de prendre Saint-Malo échoue le 5 août. Les Dinardais savent que la libération approche, car les canons allemands de la ville participent aux combats. Les Américains doivent monter une attaque en règle qui sera conduite par la 83e division d’infanterie, renforcée par le 121e régiment d’infanterie qui aura la mission de prendre Dinard. Qu’il me soit donné l’occasion de saluer ici la mémoire de Edward Lee, plus tard francisé en Lée. Edward, grand-père de notre ami Hervé JEAN, a conduit les Américains pour les amener jusqu’à Dinard. Il leur servait d’interprète. Son courage et son dévouement doivent, ainsi, être salués.

Le 121e est un régiment quasiment inexpérimenté qui va devoir faire face à un adversaire particulièrement redoutable, le colonel BACHERER qui fait la guerre pratiquement en continue depuis 1939 et qui retraite de Normandie avec les restes de sa division. Il dispose, de surcroît, de chars ce dont les Américains ne se doutent pas. 6 jours de combat et de nombreux renforcements seront nécessaires pour franchir la ligne de défense de Pleurtuit. Le 121 va perdre 400 de soldats, dont 1/3 de tués, lors de ces combats.

Le journal de marche et des opérations du 121e Régiment d’infanterie précise : « le 14 aout 1944 : ça va être l’assaut sur la ville de Dinard. Ayant percé toutes les fortifications permanentes, ce sera l’opération finale de notre mission. Aucun contact avec l’ennemi n’a été signalé par les patrouilles de reconnaissance. L’heure H est fixée à 9h30. »

Les Allemands se sont retranchés dans les fortifications de la côte. L’artillerie américaine canonne la ville à partir de 8h30. Dès 10h30 des Dinardais signalent la présence de soldats américains au boulevard du Villou près du bunker de l’hôpital construit par les Allemands. À 11h, les unités à l’ouest de Dinard ont atteint la mer près du port Blanc.

À l’est par l’entrée principale, la résistance allemande est plus sérieuse en raison de la présence de plusieurs Bunkers et de blindés. Les derniers occupants se rendront le 15 aout après la capitulation du colonel BACHERER, alors qu’il était retranché à la Garde Guérin à Saint-Briac. Des obus tombent encore sur la ville mais ils sont allemands et proviennent des Batteries de Cézembre. Saint-Malo est libérée le 17 août, et la reddition de Cézembre, pilonnée à partir de la côte d’Émeraude, y compris avec des canons positionnés à Dinard, a lieu le 2 septembre.

Dinard paye cher cette libération avec près de 150 bâtiments détruits par les bombardements et les incendies ; sur les 3000 chambres d’hôtels que comptaient la commune avant-guerre, plus de 1600 sont détruites soit par les bombardements soit par les destructions faites par les Allemands. 13 des plus grands hôtels de la ville sont sinistrés.

Et si les stigmates affectent les bâtiments et les lieux, ils affectent aussi, hélas, les populations.

Le monument aux morts devant lequel nous sommes réunis aujourd’hui, avec les 60 noms de militaires, de résistants, de déportés, de civils tués lors des bombardements impose le respect et la reconnaissance.

La seconde guerre mondiale aura marqué le 20ème siècle de son empreinte dramatique. La barbarie, l’horreur impensable de l’Holocauste, les populations civiles massacrées, le patrimoine détruit, rien ne sera plus comme avant.

Après une période de doute, d’hébètement, l’heure était à la reconstruction et à la réconciliation. Cette dernière n’était pas innée, loin de là, lorsque l’on considère les horreurs auxquelles le monde a fait face durant le conflit. Mais certaines personnes y croyaient, et ont contribué à rapprocher les peuples qui s’étaient meurtris dans leurs chairs durant ces 6 longues années.  Chacune et chacun, dans vos familles respectives, qu’elles soient bretonnes ou d’ailleurs, vous avez une anecdote, une histoire relative à la seconde guerre mondiale. Dans ma propre famille, mon grand-père, le Colonel François LUCAS, est, à l’époque nommé Capitaine dans la résistance, dirigeant jusqu’à  450 hommes alors qu’il n’a que 23 ans ! Il participera, lui, à la libération de nos voisins et amis dinannais avec les américains.

Toutes ces histoires, comme la mienne, doivent être transmises, pour qu’elles demeurent, pour qu’elles témoignent de la folie qui peut s’emparer des hommes mais aussi du courage et de l’abnégation dont d’autres ont su faire preuve au péril de leur vie. Ce devoir de mémoire est, aujourd’hui, le nôtre, collectivement.

Le dernier membre du commando Kieffer, Léon Gautier, s’est éteint le 3 juillet dernier à 100 ans. Ce héros français avait participé au débarquement de juin 1944. Parce qu’il n’a eu de cesse de témoigner, sa mémoire et celle de ses 176 camarades est, aujourd’hui, préservée et transmise malgré sa disparition.

Nous sommes, toutes et tous responsables de ce qui peut provoquer un emballement guerrier.

Il ne faut jamais fermer les yeux sur la remise en cause, parfois de manière détournée, de nos principes républicains. Nos ancêtres se sont battus pour les défendre. Cessons aussi de détourner le regard lorsque des atteintes au vivre ensemble ont lieu, lorsque des personnes font remonter à la surface des idéologies nauséabondes, lorsque des élus de la République tentent, malicieusement, de fragiliser nos valeurs pour déséquilibrer nos institutions. De telles attitudes n’honorent pas la mémoire de nos héros, n’honorent pas la mémoire de celles et ceux qui se sont battus pour que notre pays retrouve sa liberté, sa douceur et son art de vivre.

La France mes amis, est un pays de tolérance. La France fait encore rêver, n’en déplaise à ceux qui disent le contraire.

Tous nos soldats, tous nos résistants, tous nos civils courageux lors de cette guerre croyaient en la grandeur de notre pays. Ils sont même, hélas et souvent, morts pour cela.

En ce 15 août, réjouissons-nous donc de célébrer la libération de notre belle Ville bien entendu. Mais n’oublions pas de demeurer vigilants car l’histoire peut être amenée à se répéter.

Parler d’Europe n’est jamais un vain sujet. Au contraire ! Il faut insister sur l’Europe, aller plus loin dans le rapprochement entre les pays, entretenir ces liens de fraternité.

Le couple franco-allemand est toujours scruté car il demeure un maître-étalon, depuis la fin de la seconde guerre mondiale, de la construction européenne et à juste titre. Quels autres pays que le nôtre et celui de nos amis allemands incarnent le mieux le rapprochement et l’amitié européenne après ce vécu dramatique commun ?

Lorsque j’ai reçu notre ami le Bourgmestre de STARNBERG, en juin dernier Patrick JANICK, nous avons beaucoup échangé sur ces sujets et sa présence à la cérémonie du 18 juin restera, pour moi et pour lui, un grand moment d’émotion.

Nos pays se sont respectivement meurtris mais notre amitié n’en est que plus forte aujourd’hui. Nous le devons bien à nos libérateurs, britanniques, américains, résistants français, et toutes celles et ceux qui se sont unis contre le nazisme.

Je terminerai donc ce discours en insistant sur la nécessité de se souvenir pour offrir à nos jeunes générations les moyens de protéger et transmettre nos valeurs. Votre présence ici, à mes côtés, est essentielle. Je vous en remercie chaleureusement.

Vive Dinard libérée, Vive la République et Vive la France !